En 1985, une phrase dans un album de finissants déclenche une controverse

En 1985, la phrase choisie par Ian Paterson pour son album de finissants a semé une telle controverse qu’elle a fait la manchette des journaux de l'époque.

Sous sa photo, l'adolescent a choisi comme légende : Mon ambition est d'aller à l’Université de l’Alberta et d’obtenir un diplôme en éducation. Je prévois de m'établir plus tar dans un quartier de banlieue tranquille avec un homme grand, riche et élégant, arborant une grosse moustache touffue.

Aujourd'hui, ces aspirations peuvent sembler anodines, mais en 1985, les droits de la communauté 2ELGBTQI+ n’étaient pas ce qu'ils sont aujourd'hui, et le climat de psychose autour du VIH et du sida était à son comble.

Dans ce contexte, cette déclaration du finissant n’est pas passée inaperçue.

En fouillant dans des archives, Remi Baker, qui participe à la recherche pour le projet d'histoire queer d’Edmonton, a trouvé un article de journal racontant la polémique déclenchée par le petit texte d'Ian Paterson.

Lancé en 2015, le projet est une collaboration communautaire, en partenariat avec l'Université MacEwan, visant à documenter les histoires de personnes queers d’Edmonton au cours des 50 dernières années.

Une couverture nationale

La phrase d'Ian Peterson, qui affichait ouvertement son homosexualité, a été interdite de publication, par son école secondaire.

En réponse, l'adolescent a lancé une pétition, qui a cumulé plus de 300 signatures parmi les 2000 élèves de son école, pour que sa phrase soit imprimée telle quelle et aussi pour dénoncer la discrimination dont il était victime.

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L’histoire a vraiment piqué ma curiosité. Alors je l’ai prise en photo, explique Remi Baker.

Remi Baker a fait part de sa trouvaille à Kristopher Wells, chercheur à la chaire de recherche du Canada pour la compréhension publique des jeunes issus de minorités sexuelles et de genre, à l’Université de MacEwan.

Ensemble, ils ont contacté le directeur actuel de l'École secondaire Harry-Ainlay, que fréquentait Ian Paterson, afin d'approfondir leur connaissance de cette histoire qui, en plus d'avoir fait les manchettes des journaux, avait aussi été exposée par l'émission 5W, de la chaîne CTV.

C'était une véritable controverse à l'époque, déclare Kristopher Wells.

Remi Baker et lui ont appris que, un an avant l'affaire de l'album, l'adolescent avait révélé son homosexualité en publiant un poème dans la revue littéraire de son école.

Malgré le soutien de certains élèves, le simple fait d’être ouvertement homosexuel était en soi controversé. Ian Paterson a d'ailleurs aussi été l’objet d’une pétition dans le but de l’empêcher d'afficher son orientation sexuelle.

J’ai trouvé impressionnant le courage qu’il avait, affirme Remi Baker.

Selon Kristopher Wells, ce sont des histoires comme celle d'Ian Paterson qui donnent aux gens l'espoir que les personnes homosexuelles ont toujours existé.

Lorsque les gens essaient de censurer nos histoires ou nos vies, nous persistons, ajoute-t-il.

Et la suite?

Finalement, la fin de son texte a été modifiée pour une formulation plus neutre, qui a été publiée : With a tall and rich companion, que l'on pourrait traduire par une personne grande et riche, ce qui n’indique pas le genre de la personne en question.

Ian Paterson se serait aussi engagé auprès de la communauté 2ELGBTQI+ et aurait participé à mettre sur pied les premières activités de la Fierté à Edmonton.

Pour le retrouver, l’équipe a lancé un appel sur TikTok. C’est ainsi qu’ils ont appris que, une fois ses études secondaires terminées, Ian Paterson aurait déménagé à Vancouver et qu'il serait mort il y a quelques années.

Un de ses amis a pu confirmer qu'Ian Paterson a fini par trouver son homme élégant arborant une moustache touffue.

Avec les informations de l'émission de radio Edmonton AM et de Nola Keeler